Une adoption réfléchie de l’automatisation n’empêche pas le développement de carrières durables, au contraire. L’entreprise VYNCKE, spécialisée dans la biomasse, et son département financier en sont la preuve.
VYNCKE est un acteur mondial dans la conversion de biomasse et de déchets industriels en une énergie électrique et thermique propre. Cette entreprise de Flandre occidentale propose des installations sur mesure permettant de produire, en fonction des besoins énergétiques des clients, de l’électricité, de la vapeur, de l’eau chaude ou de l’huile thermique. Chaque année, VYNCKE reçoit environ quatre cents demandes de projets, venues des quatre coins du monde et concernant toutes sortes de secteurs, qui sont réduites à une trentaine de projets à la suite d’un screening détaillé. "Pour ne jamais pâtir d’événements imprévus, il est très important de varier notre sélection en fonction d’un critère géographique, mais aussi d’un critère de contenu », explique Elke Toye, CFO de VYNCKE. "Et il faut croire que cette approche fonctionne, car nous travaillons en nous basant sur la continuité et la croissance d’une entreprise familiale qui existe depuis 1912."
VYNCKE opère dans un secteur relativement volatil, dans lequel interviennent de nombreux paramètres, changements et incertitudes, ce qui rend essentiel, mais aussi complexe, le rôle d’Elke Toye et de son équipe financière au sein de l’organisation. "Nous voulons être plus que le dernier maillon de la chaîne. Nous sommes impliqués dans l’ensemble du processus, de l’étape qui précède la vente au service clients, et nous suivons de près le volet financier de chaque projet. Cette approche nous permet de signaler tôt les risques éventuels, et d’apporter des nuances contractuelles là où c’est nécessaire : des détails, mais qui peuvent faire toute la différence si quelque chose se met soudainement à dérailler. » Le controlling est aussi une étape importante. « Au terme de chaque projet, nous procédons à des calculs minutieux qui nous apportent des informations précieuses pour la budgétisation de projets futurs."
"La maturité de l’équipe financière a fait des bonds incroyables", intervient Carl-Philippe Verfaillie, Business Manager chez TriFinance. "Il y a encore quelques années, le département financier travaillait surtout de manière réactive. Il peut aujourd’hui intervenir comme partenaire commercial et réfléchir à chaque étape du projet avec le client. La croissance de VYNCKE en tant qu’entreprise va réellement de pair avec la croissance de ses collaborateurs."
Nous avons éliminé toutes les tâches répétitives sans valeur ajoutée. Résultat : nos tâches se sont largement diversifiées.
L’automatisation pour une plus grande valeur ajoutée humaine
Lorsqu’Elke Toye – désignée CF’Hope of the Year par le magazine Trends-Tendances – a rejoint les rangs de VYNCKE en 2020 en tant que Global Finance Manager, elle a constaté que l’entreprise avait une bonne marge d’amélioration. "Le traitement des factures et la consolidation se faisaient encore manuellement, ce qui permettait, avec relativement peu d’efforts, de faire de grands pas en avant. Nous utilisons aujourd’hui un outil qui combine RPA et IA pour encoder automatiquement les factures. En raison de la complexité inhérente à nos activités, il est impossible d’automatiser de tels processus à 100 %, mais avec notre ratio de réussite actuel de 83 %, nous pouvons quand même rendre superflues toutes sortes de manipulations humaines."
Avec en parallèle un système ERP intelligent (baptisé The Brain, un outil développé par l’entreprise elle-même qui rassemble les données financières et non financières de manière structurée) et quelques autres outils spécifiques, notamment pour générer des immatriculations à la TVA, toute une série de tâches chronophages ont disparu. "Nous avons éliminé toutes les tâches répétitives sans valeur ajoutée. Résultat : nos tâches se sont largement diversifiées. Nos collaborateurs financiers contrôlent l’output et disposent de beaucoup plus de temps pour réaliser des analyses qui apportent une valeur ajoutée."
Puisque la numérisation permet un reporting standardisé, personne ne peut nier que le département financier de VYNCKE est aujourd’hui nettement plus efficace. Pourtant, Elke cite surtout le facteur humain quand on lui demande les avantages de l’automatisation dans la finance. "Quelqu’un qui passe trois heures par jour de travail à comparer une série de feuilles Excel et à scanner des documents se posera forcément des questions sur l’intérêt de son travail. En revanche, une équipe qui peut se consacrer à des analyses qui exigent une expertise humaine et qui sont beaucoup plus passionnantes à faire, sera forcément plus motivée. Cette façon de travailler permet aussi aux collaborateurs de développer leurs compétences dans d’autres domaines. C’est ainsi que les soft skills ont gagné en importance."
L’automatisation joue donc un rôle de catalyseur dans la politique de carrière durable chez VYNCKE. Sur un marché du travail complexe, l’automatisation a même un objectif double : en raison de la productivité accrue, le nombre de postes vacants diminue, et l’offre d’un travail réellement intéressant représente un facteur de différenciation pour attirer et conserver des talents.
L’importance d’une perspective à long terme
Elke Toye estime qu’il est indispensable de voir loin et de garder un œil sur les développements dans les autres domaines de l’organisation. C’est la seule façon d’offrir aux collaborateurs des perspectives de carrière réellement durables. "Le département financier doit suivre la numérisation qui a lieu dans le reste de l’organisation. Il s’agit de la seule solution pour rester au service du plus grand nombre. En parallèle, il est important d’avoir une vue claire des ambitions des collaborateurs. Le défi consiste à faire correspondre ces deux éléments. J’y parviens en veillant notamment à ce que tous mes collaborateurs aient une vue sur l’avenir de l’entreprise et de son département financier, et en discutant régulièrement avec eux de leur carrière. Sans oublier de les encourager également à réfléchir toujours plus loin, au sujet des procédures et processus, mais aussi au sujet de leur propre évolution."
L’ownership comme plus grand facteur de réussite
Prendre le temps d’expliquer aux collaborateurs pourquoi de nouveaux outils sont mis en place et comment ces outils les aideront à accomplir leurs tâches quotidiennes est une étape cruciale pour une implémentation réussie de nouveaux systèmes. Mais dans le contexte de carrières durables, cela signifie sauter une étape importante. "Dans un monde idéal, l’initiative doit venir des collaborateurs eux-mêmes, ou bien les utilisateurs finaux contribuent au moins à la mise en place des outils", poursuit Elke Toye en abordant le principe d’ownership. "En impliquant les collaborateurs et en leur demandant leur avis, on crée en effet des systèmes de meilleure qualité, adaptés aux besoins concrets d’un rôle spécifique. Les collaborateurs se montrent aussi nettement plus motivés à utiliser ces nouveaux outils ou à réaliser leur travail d’une autre manière grâce à ce soutien technologique."
Au sein des organisations qui mettent l’accent sur ce principe d’ownership, les collaborateurs ne voient pas l’automatisation comme un danger. Pour eux, de tels outils ne sont pas là pour les remplacer, mais pour les aider à mener à bien leurs tâches quotidiennes de manière plus efficace. "Lorsque les collaborateurs opposent quand même une certaine résistance, il est recommandé de faire machine arrière et d’écouter leurs préoccupations. Et ensuite de reprendre l’adoption des outils de manière progressive, afin que chacun ait le temps de s’y faire."
Chaque collaborateur se voit proposer un trajet sur mesure pour favoriser sa croissance personnelle, composé par exemple de formations internes ou externes ou de la mise en place progressive du nouveau rôle, en bénéficiant du soutien nécessaire.
Upskilling et reskilling
C’est évident : l’automatisation entraîne, par définition, un changement dans les descriptions de fonction. Certains collaborateurs se retrouvent à travailler avec un assistant basé sur l’IA et doivent approfondir leurs compétences numériques, tandis que d’autres finissent par exercer une autre fonction, passant par exemple de la comptabilité au controlling. Le besoin d’upskilling et de reskilling, ainsi que d’une stratégie durable de gestion des talents, est réel. "De quelles nouvelles compétences une personne a-t-elle besoin en fonction de l’évolution de ses tâches ? Ou quelles compétences un comptable doit-il approfondir pour passer à un rôle de Controller ? Ces questions, et d’autres, sont abordées lors de nos entretiens annuels avec les collaborateurs. Sur cette base, chaque collaborateur se voit proposer un trajet sur mesure pour favoriser sa croissance personnelle, composé par exemple de formations internes ou externes ou de la mise en place progressive du nouveau rôle, en bénéficiant du soutien nécessaire."
Elke Toye insiste sur le partage de responsabilités entre le collaborateur et l’organisation : on attend des talents financiers qu’ils ne s’encroûtent pas dans leur rôle et qu’ils osent sortir de leur zone de confort pour façonner leur carrière, mais avec le soutien des dirigeants et du service RH, qui veillent à leur fournir les incitants et moyens nécessaires. Et ce n’est pas un luxe, car l’importance d’une capacité d’apprentissage efficace continuera de grandir à l’avenir. "Il suffit de regarder l’évolution de l’IA pour comprendre qu’elle poursuivra son ascension dans les années à venir. Il n’est bien sûr pas réaliste de vouloir transformer chaque comptable en un spécialiste de l’IA, mais tous les professionnels de la finance devront, quoi qu’il en soit, développer de nouvelles compétences."
Une culture d’entreprise solide
Au sein d’une entreprise familiale comme VYNCKE, on accorde aussi une grande importance à conserver une culture d’entreprise solide et à un équilibre sain entre le travail et la vie privée. "J’essaie de répartir les tâches de manière claire, de sorte que chacun sache où il en est du point de vue du planning et de la responsabilité. Pour soulager l’équipe, nous travaillons aussi avec des procédures et règles clairement définies. Nous avons aussi instauré une politique de déconnexion, qui interdit de travailler le soir et le week-end et qui veille à ce que les pics de travail soient suivis de périodes plus calmes. "Le fait que le siège de VYNCKE à Harelbeke propose de nombreuses possibilités de détente et que le bâtiment soit entouré d’un verger, d’un vignoble et d’un terrain de padel n’est qu’un exemple de mesures reprises dans cette politique. "Enfin, nous prenons aussi régulièrement le temps de célébrer nos petites victoires. Cela peut sembler anodin, mais nous le voyons comme un signe de reconnaissance."
Flexibilité, envie d’apprendre et confiance en soi
Pour conclure, cette question : en tant que professionnel(le) de la finance, faites-vous en sorte de rester durablement "à la page" dans ce monde en constante évolution ? "Il reste bien sûr indispensable de connaître son domaine (une base comptable solide demeure cruciale dans ce monde complexe), mais il faut pouvoir évoluer avec un secteur qui, lui aussi, évolue sans arrêt. La flexibilité et l’envie d’apprendre sont donc des qualités fondamentales à avoir de nos jours. Tout comme la confiance en soi, d’ailleurs : il faut savoir qu’on dispose de compétences qu’un ordinateur ne maîtrisera jamais." C’est justement pour cette raison qu’Elke Toye aime souligner l’importance des soft skills. "Les professionnels de la finance doivent aujourd’hui être capables de communiquer de manière efficace. En effet, pour avoir un impact et faire grandir une entreprise, il faut aussi être capable de raconter l’histoire qui se cache derrière les chiffres."
Avec notre équipe financière, nous voulons être plus que le dernier maillon de la chaîne. Nous sommes impliqués dans l’ensemble du processus. Cette approche nous permet de signaler tôt les risques éventuels.
Volatil, complexe, ambigu, incertain... Voilà comment on pourrait qualifier le monde dans lequel nous vivons. D’ici cinq ans, les jobs dans le domaine de la finance ne seront plus les mêmes qu’aujourd’hui. Quels changements nos fonctions subiront-elles ? Quels nouveaux rôles apparaîtront et lesquels disparaîtront ? Nul ne le sait à l’heure actuelle.
Mais une chose est sûre : l’avenir appartient aux professionnels de la finance qui sauront accepter ces changements, ne jamais s’arrêter d’enrichir leurs connaissances et oser se réinventer. Mais aussi aux employeurs qui adopteront une approche durable en matière de gestion des talents, qui accompagneront leurs collaborateurs dans le développement de leurs compétences et qui continueront à aligner les besoins de l’entreprise sur ceux de leurs employés.
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